Je posai le pied devant l'entrée de l'agence. Ah, ça faisait longtemps que je n'étais pas passé par là. Ca faisait quoi, six ? Sept mois que je n'étais pas venu ? Ca remontait à si loin quand j'y pensais. En entrant à l'intérieur du bâtiment, m'annonçant à l'accueil, je ressentais toujours cette atmosphère intimidante. C'était comme si je ne me sentais pas à ma place. C'était un tout autre monde que j'avais voulu tenter à l'époque, lors de ma première visite. On m'avait invité à passé un casting pour devenir apprenti mannequin, mais je n'avais pas eu de réponse immédiate suite à l'entretien. J'avais considéré ça comme un rejet de la direction, mais je n'en tenais pas tellement compte. Si j'étais ici aujourd'hui, mains dans les poches et attendant qu'on vienne me chercher, c'était parce que Kang Min Ho, patron de la boîte et proche ami, m'avait donné rendez-vous. Genre. Professionnellement. Avait-il reconsidéré mon dossier ? Me voulait-il comme associé dans son agence de mannequinat ? Beaucoup de questions se chevauchaient dans ma tête, et je restais sans réponse, avec frustration. Et puis, le timbre de voix de Min Ho au téléphone était différent d'habitude. Je sentais que quelque chose clochait, et ça alourdissait encore plus mon coeur.

Finalement, une secrétaire vint me chercher et je me levai de ma chaise pour la suivre, gardant une certaine distance par pur respect. Elle ouvrit la porte du directeur, m'annonça avec neutralité et professionalisme, puis elle me laissa tranquille. Je la suivis du regard avec curiosité, puis je fis un pas à l'intérieur du bureau, un peu perdu. « Ok euh... Bonjour Min Ho. Je suis venu. » Je me permis de fermer la porte derrière moi. Je m'avançai de quelques pas dans le bureau, sans pour autant prendre mes aises parce que quand même, Min Ho était le directeur de cette entreprise, c'était clairement son territoire. « Pourquoi tu m'as fait venir ici ? On aurait pu tout simplement discuter autour d'un café ? »

J’avais passé la nuit entière a y réfléchir. Comment avait-il pu faire cela sous mon nez sans que je n’en sache rien pendant si longtemps ? Hein ? Comment ? Comment c’était possible ca ? J’étais le patron ici quand même. Je savais tout ce qui se passait, à la seconde où ca se déroulait à l’intérieur des locaux de Vogue magasine. Alors je ne comprenais pas comment j’avais pu passer à côté de cela. Je l’avais appris totalement par hasard hier soir lors d’une conversation-conférence avec Soo Ah, ma petite sœur retournée en Amérique, durant laquelle quelques confidences en sont ressorties dont celle où elle aurait apparemment couché avec Jihoon. Le mec même que je considère comme mon alter ego, ayant un panneau de chasse aussi bien remplie que le mien pour ne pas dire plus rempli. Je n’arrivais pas à croire que ce chaud lapin avait osé se faire ma propre sœur. Il y avait tant de femmes dans ce bas monde qu’il aurait pu se taper n’importe laquelle qui se jetterait à ses pieds sans aucune difficulté. En temps normal, je m’en serais bien fichu si il s’agissait d’une ami ou autre de mes connaissances, mais ma petite sœur… Le grand frère en moi ressortait dans de tel moment. Un bref instant, je repensais à ce mec qui était sorti avec Soo ah il y a plusieurs années, quand elle avait encore son ancienne apparence. Il s’était joué d’elle, la faisant souffrir. Il avait beau être mon meilleur ami à l’époque, ca ne m’avait pas empêché de l’envoyer à l’hôpital. J’étais loin d’être un vilain garçon ou un bagarreur, mais quand il s’agissait de Soo Ah… Je montais vite dans les tours. Et en cet instant, je fulminais. Heureusement pour Ji Hoon, il ne l’avait pas fait souffrir. Il lui avait même fait prendre son pied, mais cela ne changeait rien. Je serais peut-être plus indulgent. Peut-être.

Quand ma secrétaire m’annonçait la venue de l’accusé, je me levais de ma chaise alors qu’il entrait dans mon bureau, le visage fermé. Une fois que la porte fut fermé, et hors des regards, je me dirigeais vers lui sans aucune hésitation. Simplement discuter autour d’un café ? Peut-être plus tard. Je fonçais droit sur loin, le fixant d’un regard sévère. Arrivé à sa hauteur, je l’attrapais pas le col de sa chemise et lui écrasait mon poing sur son nez sans aucun ménagement. Je finis par le lâcher, une fois ma colère déversée sur sa personne. Je me détournais pour retrouver ma place de directeur de Vogue, remettant ma veste bien en place. « Maintenant, on peut discuter. »

Il se leva. Mon regard se dressa rapidement sur lui, dans l'incompréhension la plus totale. Min Ho était tendu, le visage tiré, et il ne laissait transparaître aucune autre émotion que de la colère. Ses yeux étaient venimeux, perçants, ils me destabilisaient. Je prenais soin d'éviter ses pupilles alors qu'il contournait son bureau. Son costume le cintrait correctement, j'avais l'air ridicule avec ma tenue simple. Il avança, encore et encore, et je sentais ma gorge se nouer. J'avais l'impression qu'un aigle s'abattait sur sa proie, et ce fut le cas lorsque Min Ho me saisit par le col de ma chemise. Il me voulait du mal. Tout se passa tellement vite que je n'eus pas le temps de réagir. Son poings partit dans ma figure et je sentis le sang me monter à la tête. Je basculai en arrière, mon nez touché de plein fouet par ses phalanges. Je ramenai vivement ma main sur mon visage, le rouge de mon sang coulant le long de ma main et de mon visage. Putain, ça faisait un mal de chien ! « Aaaah mon nez ! » maugréai-je en tapotant du bout des doigts mon cartilage sensible.

Je n'arrêtais pas de saigner. Min Ho était retourné à sa place après avoir ajusté son costume. J'était recroquevillé contre moi-même, essayant d'arranger mon hémorragie nasale qui refusait de s'arrêter. Je regardais autour de moi, à la recherche de mouchoirs. Je savais que Min Ho ne tarderait pas à me venir en aide, vu comment je salissais sa précieuse moquette et ses fauteuils hors de prix. Je relevai cependant mon regard douloureux sur Min Ho, ne comprenant pas son geste. C'était mon ami, je le considérais comme mon égal. Qu'avais-je fait pour mériter un tel geste de sa part ? Je me rapprochai du bureau en tanguant, j'avais la tête qui tournait. « B... Bouquoi d'as fait za ?» Super, j'étais incapable d'articuler correctement mes mots vu comment mon nez était touché. J'osais espérer me faire comprendre de Min Ho, mais une chose était sûre: j'allais m'en prendre plein la tronche aujourd'hui.